Le 29 février 2020, Bruno Le Maire, Ministre de l’Economie et des Finances, avait indiqué que le Covid-19 était un cas de force majeure pour les entreprises, en particulier dans les marchés publics de l’État, justifiant l’inapplication des pénalités en cas de retard d’exécution des prestations contractuelles.
L’Ordonnance du 25 mars 2020 n° 2020-306 n’est venue que partiellement répondre aux problématiques rencontrées dans le secteur du BTP. En effet, celle-ci ne reconnait pas la caractère de force majeure de la situation sanitaire actuelle dans ce secteur, et ce en dépit de son caractère exceptionnel.
Ainsi, seuls les marchés publics ont le mérite de pouvoir bénéficier de dispositions particulières en la matière permettant de reconnaître, au cas par cas, si la force majeure peut être retenue, justifiant ainsi l’interruption du marché.
Pour autant, le gouvernement n’a pas instauré de règles particulières en marché privé permettant de rassurer les entreprises du BTP.
De plus, à la suite de la publication du tant attendu guide OPPBTP, la plupart des professionnels du BTP, et notamment les architectes s’accordent pour considérer que les directives de sécurité sanitaire sur les chantiers sont intenables pour la plupart d’entre eux.
En effet, la situation sanitaire actuelle ne permet plus d’assurer les approvisionnements, et certaines entreprises ne sont malheureusement pas en mesure de respecter les préconisations émises par le guide pour assurer les modalités de sécurité sanitaire.
Il convient à cet effet de s’interroger sur la possibilité pour ces dernières de se prévaloir du cas de force majeure.
En marché public
Avec la publication de l’ordonnance, l’État a reconnu la crise sanitaire liée au Covid-19 comme étant un « cas de force majeure » pour l’ensemble des marchés de travaux publics, protégeant ainsi les entreprises contre le risque de se voir infliger des pénalités contractuelles de retard ou de voir résilier leurs marchés en cas de retard d’exécution.
L’article 6 de l’ordonnance n° 2020-319 du 25 mars 2020 prévoit les modalités spécifiques de suspension des marchés publics :
En l’état, selon l’enquête réalisée par la FNTP, 80% des chantiers seraient à l’arrêt, de sorte que la reprise ne pourra être effective que sur des niveaux d’activité partiels. La relance de l’activité généralisée du secteur du BTP semble donc difficile à mettre en oeuvre: il paraît évident que les chantiers sur lesquels plusieurs corps d’état sont présents ne seront pas en mesure de respecter les mesures de sécurité et de santé sanitaires (absence de fourniture de masques et de gels, défaut d’approvisionnement…). Néanmoins, l’ordonnancement du chantier mérite d’être repensé si les entreprises affirment disposer des moyens leur permettant d’assurer l’exécution de leurs obligations, en accord avec le Maître d’ouvrage, le Maître d’oeuvre, et le coordinateur sécurité et protection de la santé. Il semble toutefois que la tentative louable de l’OPPBTP d’avoir établi un guide ne soit pas suffisante, dès lors que les acteurs du secteur du BTP restent toujours en opposition sur les modalités de poursuite de leur activité (Guide de l’OPPBTP : architectes et salariés expriment leurs doutes). Louise GAENTZHIRT Avocat Construction Urbanisme et membre du réseau Jurisglobal
- Si le respect du délai contractuellement prévu s’avère impossible, ou de nature à entraîner une charge manifestement excessive pour le titulaire du marché et à la demande du titulaire du marché de travaux, le délai contractuel d’exécution peut être reporté pour une durée équivalente à la durée de l’état d’urgence sanitaire augmentée de deux mois.
- En cas d’impossibilité pour le titulaire d’exécuter le marché de travaux, ou dans des conditions qui ne soient pas manifestement excessives du fait de l’importance de la charge en découlant pour lui, le maître d’ouvrage public peut librement conclure à ses frais un nouveau marché de travaux avec un tiers, garantissant le respect du délai initialement prévu, sans qu’il puisse être infligé de pénalités ou engagé d’action en responsabilité du titulaire.
- Le titulaire du marché de travaux public, peut solliciter une indemnisation s’il démontre avoir procédé à des modifications nécessaires à la poursuite de son exécution occasionnant des surcoûts manifestement excessifs au regard de sa situation financière, peut solliciter une indemnisation.
- il n’y a pas de force majeure si le contrat peut toujours être exécuté (CA Paris, 8e ch., sect. A, 29 juin 2006, n° 04/09052)
- le cocontractant défaillant doit prouver que l’empêchement a rendu impossible l’exécution du contrat (CA Paris, pôle 6, ch. 12, 17 mars 2016, n° 15/04263)
- l’événement invoqué doit répondre aux trois caractéristiques de la force majeure (CA Montpellier, 2e ch., 18 décembre 2018, n° 16/04959)
En l’état, selon l’enquête réalisée par la FNTP, 80% des chantiers seraient à l’arrêt, de sorte que la reprise ne pourra être effective que sur des niveaux d’activité partiels. La relance de l’activité généralisée du secteur du BTP semble donc difficile à mettre en oeuvre: il paraît évident que les chantiers sur lesquels plusieurs corps d’état sont présents ne seront pas en mesure de respecter les mesures de sécurité et de santé sanitaires (absence de fourniture de masques et de gels, défaut d’approvisionnement…). Néanmoins, l’ordonnancement du chantier mérite d’être repensé si les entreprises affirment disposer des moyens leur permettant d’assurer l’exécution de leurs obligations, en accord avec le Maître d’ouvrage, le Maître d’oeuvre, et le coordinateur sécurité et protection de la santé. Il semble toutefois que la tentative louable de l’OPPBTP d’avoir établi un guide ne soit pas suffisante, dès lors que les acteurs du secteur du BTP restent toujours en opposition sur les modalités de poursuite de leur activité (Guide de l’OPPBTP : architectes et salariés expriment leurs doutes). Louise GAENTZHIRT Avocat Construction Urbanisme et membre du réseau Jurisglobal